Pourquoi parler de la Théorie Polyvagale (TPV), et du Système Nerveux Autonome?
Parce que connaître les bases du fonctionnement du Système Nerveux Autonome (ou SNA) permet de comprendre ce qui se passe lorsque nous avons des émotions fortes: de stress, de colère, de peur, de honte, etc...
Alors, il est possible de sortir d'états parfois très douloureux psychiquement. Et même retrouver une vie normale, voire la trouver pour la première fois de sa vie !
Et c'est mon but: vous aider à comprendre les bases pour vous donner envie de travailler à améliorer votre vie, en sachant que cela a toutes les chances de fonctionner.
En termes simples, la Théorie PolyVagale (ou TPV) permet de comprendre comment notre corps et notre esprit travaillent ensemble en réaction à des stimuli externes et internes, conscients ou inconscients.
Le Système Nerveux Autonome (SNA)
Le Système Nerveux Autonome est la partie de notre système nerveux qui régule les fonctions involontaires (automatiques) de notre corps. Il sert à faire transiter l'information à travers le corps dans les organes, les muscles, les glandes hormonales.
Le nerf vague joue un rôle clé dans la régulation de nos fonctions automatiques: notre rythme cardiaque, notre respiration, notre digestion, et notre état émotionnel. Le nerf vague est le plus long nerf du corps humain: il part de la base du cerveau à l'intestin, en reliant le cerveau au corps.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, à notre époque où le cerveau est survalorisé par rapport aux autres organes dans les civilisations occidentales, 20% de l'information circule entre le cerveau et le corps, et 80% entre le corps et le cerveau. D'où l'importance d'écouter les messages de notre corps, qui nous renseignent sur nos états physiques, mais aussi indirectement sur nos états mentaux.
Dans mon article sur le stress, je donne des explications sur la genèse de nos comportements face aux dangers. Allez le lire pour comprendre l'origine des maux auxquels nous faisons face dans nos sociétés contemporaines, basés sur nos réflexes de survie liés à la peur: l'attaque, la fuite ou le figement.
Toutefois, il est possible d'amener davantage à la conscience nos comportements parfois inconscients grâce à une théorie créée et développée par le neuroscientifique et psychologue, le docteur Stephen Porges, en 1994: la Théorie PolyVagale (ou TPV).
Cette théorie récente nous permet de mieux appréhender comment notre système nerveux, via le nerf vague, répond à différentes situations, de manière consciente, face à un danger, et de manière inconsciente, à cause de nos traumas, de nos croyances (cf schémas inadaptés de Young), de nos blessures émotionnelles.
Nos traumas ou blessures émotionnelles
A ce stade, il est utile de préciser que de nombreuses personnes n'ont pas eu de "réels traumas", au sens traditionnel du terme. Ces traumas "traditionnels" sont des évènements d'intensité forte, à laquelle chacun réagit différemment. Toutefois, à ces traumas évènementiels ou chroniques, s'ajoutent des blessures émotionnelles. Elles peuvent être dues par exemple à des blessures d'enfance, très pesantes, selon la théorie de l'attachement de John Bowlby. Cette théorie, datant des années 1940-70, a été démontrée par les neurosciences dans les années 2000. Ainsi, un manque de soin ou d'attention pendant la petite enfance peut-il amener à des comportements de figements dysfonctionnels automatique à l'âge adulte. Alors, notre SNA peut être déréglé et nos réactions incontrôlables.
Par conséquent, bien que le mot de "trauma" inquiète et nous ramène à des situations effrayantes dans notre imaginaire, en réalité, nous avons quasiment tous des mémoires traumatiques, plus ou moins importantes, et avec plus ou moins de conséquences sur notre vie quotidienne.
Certains auteurs et psychothérapeutes font même référence à des Mémoires traumatiques transgénérationnelles.
Quoiqu'il en soit, nous réagissons face à un danger clairement perçu par notre partie consciente, notre mental, ainsi que par des dangers réels ou non inconscients, et liés à notre histoire. C'est la neurosception dans la théorie de Stephen Porges.
L'objectif d'étudier la TPV, est de réduire l'impact de la neuroception, et de la remplacer par de l'intéroception, l'observation directe de nos états physiques et émotionnels, qui nous permettra de faire évoluer des comportements automatiques non désirés liés à la peur ou à la honte.
Les impacts du système nerveux sympathique et parasympathique
Historiquement, notre espèce a dû s'adapter à son environnement de chasseur/ cueilleur.
Quoi que certains en disent, nous faisons partie du règne animal et nous avons des comportements proches des mammifères évolués tels que les chimpanzés.
Nous réagissons à notre environnement en:
- ayant des relations agréables avec nos compagnons, collègues, familles, groupes sociaux
- fuyant un danger ou en attaquant pour se défendre du danger
- étant figés face à un danger de mort si l'attaque et la fuite nous sont impossibles
Ces 3 types de réactions primaires sont liés à 3 fonctionnements de notre système nerveux autonome, lui-même constitué du système sympathique et du système parasympathique.
- Le système parasympathique ventral nous permet d'être calme, détendu, serein, en harmonie avec nos pairs. Il peut être atteint ou retrouvé par des respirations adaptées, des méditations, du sport, du rire, du lien humain ou animal. Notre énergie est adaptée, de niveau moyen. Nous sommes en connexion avec les autres autour de nous de manière harmonieuse. Nous sommes en confiance en nous et en les autres. Le monde est facile, tout se passe bien. Nous avons de la chance. C'est là qu'on parle de synchronicités. Nous sommes à l'écoute de tous les signaux, internes et externes.
- Le système sympathique amène de l'énergie. Il nous est utile pour toute action. Il est donc nécessaire, mais à dose raisonnable. C'est lui qui permettait le combat ou la fuite chez nos ancêtres.
Notre énergie est à son maximum. Dans cet état, le corps amène le sang à nos muscles, au détriment de la peau, du système immunitaire, de l'estomac. Et notre rythme cardiaque s'accélère. Nous sommes dans la méfiance: le monde est compliqué, stressant. Nous ne nous faisons pas confiance et nous nous méfions des autres. Nous devons nous protéger, nous battre. Nous faisons des efforts pour nous en sortir. C'est le monde de la compétition, de la performance. Nous avons un vocabulaire combatif dans ce mode là, cette attitude là.
- Le système parasympathique dorsal nous coupe de toute énergie, nous dissocie de nous-mêmes. C'est lui qui est déclenché en cas de stress intense, de forte peur lorsque les 2 autres modes n'ont pas pu être activés, parce que nous ne nous sentons ni capables d'attaquer, ni de fuir. Dans la nature, il amène à une position de figement. Dans notre société, cela ne veut pas nécessairement dire que nous ne bougeons plus, mais nous ne sommes plus capables de réfléchir, nous "suivons le mouvement" passivement, nous acceptons les propositions qui nous sont faites. Et nous n'avons aucune énergie. Nous nous sentons déprimés, fatigués, anxieux. Nous nous replions sur nous-mêmes. Nous pouvons même ressentir des douleurs corporelles.Inhibés, nous n'avons confiance ni en nous-mêmes, ni aux autres. Le monde est dangereux, injuste. Nous devons nous isoler. Nous nous sentons isolés, impuissants, et nous n'avons rien envie de faire.
Il faut une dose de sympathique et de parasympathique pour se sentir bien et détendu tout en ayant de l'énergie. Ces modes ne sont donc pas exclusifs. Et tous les modes sont OK.
Toutefois, en cas de peur réelle ou fantasmée (cf article sur le stress chronique), on retrouve bien une hiérarchie des réactions qui montent crescendo:
1= Ventral --> 2=Sympathique --> 3=Dorsal,
et qui redescendent selon cette même logique:
1=Dorsal --2=Parasympathique --> 3=Ventral.
C'est ainsi qu'après un stress fort, tel que parler en public, on peut se retrouver à trembler, ce qui montre que notre corps est sorti du figement fonctionnel pour aller vers le sympathique avant un retour au calme en ventral.
L'utilisation pratique de la théorie polyvagale
Retenons de ce qui précède que nous pouvons observer ce qui se passe en nous, et même agir en partie dessus.
L'intérêt de connaître la Théorie Polyvagale est de pouvoir s'observer, et par conséquent d'apprendre à agir partiellement sur ce qui se passe.
Non pas qu'on puisse transformer nos réactions, mais le fait de se rendre compte, et d'accepter qu'on se trouve dans un mode en particulier, nous aide à prendre du recul et à minimiser l'impression de danger. Rappelons que ce danger est fantasmé dans 90% des cas. Alors, il est possible de travailler sur de la co-régulation, en fréquentant des personnes qui nous "tireront" vers le haut par effet miroir, et de l'auto-régulation, par des méthodes telles que par exemple la Somatic Experiencing de Peter Levine ou par du coaching holistique (ex: Soul coaching).
Il est important que l'état de stress ne perdure pas. Car il y a transformation d'une émotion initiale (la peur) en trait de caractère sur le long terme. Il est alors bien plus difficile de s'en débarrasser, sauf à effectuer un long travail sur soi, souvent avec un accompagnateur (thérapeute ou coach).
Voici l'évolution d'une émotion à un trait de caractère:
émotion -> sentiment -> humeur -> tempérament -> caractère
Cette observation de notre état permet de savoir quel est notre mode de fonctionnement au moment présent. Tous les états ont leur raison d'être... Tous sont OK à condition ne ne pas s'y enfermer trop longtemps.
La théorie polyvagale nous indique que le fonctionnement de notre système nerveux n'est pas binaire, en mode soit stressé soit calme, mais qu'il est dynamique et adaptatif.
Ainsi, la compréhension de cette théorie permet-elle de mieux appréhender nos émotions, et d'adapter nos réactions à la situation, d'utiliser des outils qui nous permettent de restaurer davantage de bien-être et de résilience.
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